Gods Of Metal : Artbook noir et blanc mais haut en couleurs
Paris by Night, pour Vampire la Mascarade
Parce que la musique n’est jamais bien loin du jdr, et quelle est un excellent support de nos parties, je vous propose de faire connaissance avec Will Argunas, qui sévit (en tout bien tout honneur) sur Ulule depuis plusieurs années.
Venez découvrir 40 icônes du Métal, et le créateur du projet.
Bonjour Will, faisons un peu connaissance ?
Bonjour Dominique. Je m’appelle Will Argunas, et je suis actuellement illustrateur, après avoir été roughman de catalogue à partir de 1997 (Toys’R Us, Conforama, Bouchara et Fly entre autres) dans le monde de la publicité, coloriste du roughman Dominique Gelli sur des roughs et des storyboards de films publicitaires pendant 10 ans, entre 2000 et 2010, pour de gros clients de Citroen, Danone ou Wonderbra, auteur de bd entre 2001 et 2014 (13 albums à mon actif), et illustrateur/sérigraphe depuis 2010.
Quel est votre parcours?
Après un bac A1 obtenu en 1990, j’ai fait une école d’art appliqué, à Poitiers. Une école privée, donc chère, où on bossait comme des malades, à raison d’une nuit blanche par semaine pour rendre les boulots à temps, voire deux. 3 ans plus tard j’en sortais avec un diplôme illustration/dessin publicitaire et une mention bien, une reconnaissance de tout le boulot abattu pendant la troisième année, mais qui ne sert à rien une fois sorti, le diplôme n’étant pas reconnu, plus le fait que dans notre beau métier, ce qui compte c’est ton book, pas quelle école tu as fait ni ta mention. J’ai passé l’été qui a suivi à faire un stage à la maquette, à Paris, aux éditions Gallimard. 4 mois qui m’ont confirmé mon choix de faire de la bd et de l’illustration plutôt que de la mise en page et un boulot salarié. J’ai fait mon service militaire en Avril 1994 dans le Sud-Ouest. 10 mois plus tard je remontais à Paris. J’ai vite dû trouver un job alimentaire (cassier/manutentionnaire chez Ed) pour pouvoir vivre sur place. 5 ans plus tard je lâchais tout pour bosser dans la pub comme coloriste. J’ai fait mes premiers boulots de com’ entre 1997 et 2000. Mes chefs de magasin étaient assez arrangeants et cools avec moi. A cette époque j’ai fait du fanzinat, de la maquette en polystyrène, des marionnettes en mousse, une pochette cd pour un pote, et des essais à droite à gauche… J’ai monté mes premiers books pour des agents de roughman qui ont défendu mon travail et m’ont trouvé mes premiers boulots payés. J’envoyais des projets bd un peu partout aussi. J’étais déterminé à y arriver, et je me suis donné les moyens d’y parvenir. Ça, plus des rencontres. Le fameux être au bon moment, au bon endroit.
Bon, on est entre nous. Ce pseudo, Will Argunas, ça vient d’où?
Will Argunas est né en 2007, avec la sortie de mon album Missing dans le label KSTR des éditions Casterman. J’avais déjà sorti 4 albums sous mon vrai nom, mais j’avais du mal à gérer le fait de voir mon nom et prénom écrits sur un livre. Je trouvais que ça sonnait pas « auteur de bd ». Et je n’aimais pas que ma présence soit annoncée au micro sur des festivals bd. J’avais l’impression d’être regardé, dévisagé, reconnu. Alors que ce que j’aime dans notre profession, contrairement à celle d’acteur ou de youtubeur, c’est notre anonymat. Ce qui compte ce n’est pas ma gueule (j’ai horreur de faire des selfies, ou alors en privé, avec ma chérie en voyage, mais ça reste privé), mais mon travail, mes dessins et mon art. Et puis j’aime l’idée de séparer vie privée et vie personnelle. C’est mon éditeur de l’époque qui a trouvé mon futur prénom. On était au téléphone. Je venais d’arriver dans une toute nouvelle collection (Missing fut le premier album signé chez eux, le premier fini et sorti en Mai 2007). J’avais changé de style de dessin, passant d’un dessin semi réaliste avec de grands aplats de noir sur Bleu(s) et L’Irlandais (série en 3 tomes), pour aller vers de la hachure réaliste. Mes histoires qui se déroulaient jusque là en France se passeraient toutes aux USA (Missing, Black Jake, Bloody September, In The Name Of, L’Homme Squelette et Uriel Samuel Andrew, plus un bouquin sur le pianiste de blues Memphis Slim et un sur la chanteuse folk Joan Baez). Et je passais de polars gentillets à des polars hard boiled, très proches de mes lectures du moment, essentiellement de la littérature américaine. Bref, Will Argunas sonnait bien et s’est révélé judicieux avec la suite de ma « carrière ». Et pour finir, à part le « W » de Will, toutes les autres lettres appartiennent à mes nom et prénoms dans la vie civile. Donc il y a un peu de moi dedans. (rires)
En 2010 je me suis mis à auto-éditer des artbooks sur les festivaliers du Hellfest. 4 bouquins ont vus le jour. Ensuite j’ai auto-édité un bouquin sur le cinéma US, un bouquin sur le roller derby (un sport essentiellement féminin qui carbure en France depuis 2010 et la sortie du film Bliss), et un hommage posthume à des Légendes du Rock (32 portraits avec textes) sorti l’année dernière.
Vous êtes actif sur Ulule, qu’est ce qui vous motive?
Ulule m’a permis de faire de l’auto-édition et de sortir mes propres livres en gérant tout de A à Z (sujet, délai, pagination, format, mise en page et vente), sans prendre le risque financier de le faire. En 2010, quand j’ai sorti Pure Fucking People, mon premier opus sur les festivaliers du Hellfest, je l’ai fait en fonds propres. Je venais d’arrêter de bosser dans la pub où je gagnais bien ma vie. J’avais de l’argent de côté. Et un besoin impérieux de publier ce bouquin. En 2012, quand j’ai eu le matériau nécessaire pour en faire un deuxième, s’est tout de suite posé la question des finances. Quand tu fais de la bd, tu es payé pendant la réalisation de ton album. Alors que quand tu fais de l’auto-édition, tu te payes après, sur les ventes (si le bouquin en question se vend, bien sûr). Ce qui oblige à te bouger le cul pour trouver des endroits où le faire. Je prends des stands sur des festivals de rock, de bd, en concerts, dans des bars. Très peu en librairie car le libraire mange entre 30 et 40 % du prix de vente du livre, et dans ce cas autant ne pas publier de bouquin. Et je ne sais plus trop comment, mais en 2012 j’ai commencé à entendre parler du crowdfunding (le financement participatif) et de la plateforme française Ulule. J’ai donc tenté ma chance. J’avais rien à perdre. Si tu atteints le montant demandé dans les temps que tu as fixé au départ, tu reçois l’argent 48 heures après la fin de la campagne. Et si tu n’arrives pas à atteindre le montant dont tu as besoin, tu perds tout. C’est quitte ou double. Ulule permet donc de financer des projets à leur création, à leur naissance. Au lieu de se voir imposé un nombre incalculable de truc dont personne ne veut (ahhhh, la surproduction!), avec le financement participatif, les gens choisissent donc de dire si oui ou non ils en veulent. C’est un soutien en amont aux artistes. Ca permet aux gens d’être là au départ de l’aventure, car à chaque c’en est une. Ce n’est jamais gagné. Ma première campagne a été financée en 15 jours essentiellement grâce au soutien de ma famille et amis. Mais sur les 2 dernières campagnes j’ai un peu galéré, et mis de l’argent dedans à des moments critiques et stratégiques. Cette année, Gods Of Metal est mon 8ème Ulule. Tant que je gagne, je joue. Et Ulule me permet aussi d’aider d’autres créations, des trucs qui sortent des sentiers battus, et développés par des artistes, comme moi, tout seuls dans leur coin. J’ai aidé 18 projets. On est vachement bien accompagné, et chaque année c’et un plaisir de monter un nouveau projet, et de le voir aboutir. C’est stressant aussi quand les jours passent et que tu ne reçois aucun mail t’annonçant que tu as reçu un nouveau soutien, et de découvrir combien. C’est assez addictif d’ailleurs comme processus…
D’où vient cette passion pour le bon son?
J’ai découvert le Metal en école d’art, en 1990, par des potes. Jusque là je n’écoutais pas des choses aussi « dures ». Chez moi j’étais l’ainé, je n’ai donc pas été initié par un grand frère. Le dessin, la bd, l’illustration étant des métiers très solitaires et monacals, j’écoute de la musique à longueur de journée. Du Metal mais aussi de la musique de films, de l’indé, du blues quand je travaillais sur la bio de Memphis Slim, du folk quand c’était sur celle de Joan Baez. L’année dernière sur Legends Never Die j’écoutais en boucle tous les albums de l’artiste pendant que j’écrivais sa bio et que je réalisais ensuite son portrait. Même chose cette année sur Gods Of Metal. Je m’immerge à fond. Je lis des bios, je mate des documentaires, je lis des interviews, je parcours des sites, des blogs sur le sujet… Je vais beaucoup en festivals (gros et tout petits) pour vendre mes bouquins. Métier génial qui me permet d’allier l’utile à l’agréable. Je vais pas mal en concert parce que je réalise de plus en plus d’affiches sur Orléans depuis 4 ans. J’ai du bon son dans les oreilles tout le temps quoi !
Et ce projet en cours ?
Gods Of Metal, mon projet Ulule du moment, est le « pendant » de Legends Never Die sorti l’année dernière, un hommage posthume à 32 icônes rock/punk/metal. Cette année je rend hommage aux dieux vivants du Metal. 31 portraits accompagnés de bio, plus une « galerie R.I.P ». soit 40 portraits en tout, pour un bouquin de 80 pages. Format habituel, 16×24 cm (le fameux format comics, pratique à vendre en festival car petit pour tenir dans un sac et mettre sous la tente). Souple. Avec un beau papier 170 gr et une reliure dos carré cousu collé, donc costaud (c’est pas parce que c’est de l’auto-édition qu’il faut faire des économies sur la fabrication du livre). C’est un peu du fanzine de luxe car la pagination n’étant pas énorme, mes bouquins ne sont pas très épais (à part celui sur le cinéma avec ses 112 pages et ses 600 gr!!!). Mais c’est important à mes yeux. Ce que j’aime aussi dans le financement participatif ce sont les contreparties, les goodies auxquels les gens ont droit en fonction du montant qu’ils mettent. Dans la culture metal on soutient énormément les groupes en portant leur merchandising, un truc très ricain, plus ou moins inventé par Kiss. Du coup je propose également du merch dans mes campagnes. Là il y a un beau t-shirt, un poster, des cartes postales couleurs et un dessin inédit en tirage limité. D’autres fois il y avait des tote bag aussi. Vu que j’imprime mes créations avec mon petit atelier de sérigraphie maison, que je vends sur ma boutik Etsy depuis 2010, j’ai un peu l’habitude de tout ça. J’ai également des expos en ce moment, dans un bar, un espace culturel Leclerc, et une salle de concert, le Chato’Do à Blois.
D’autres projets à venir?
Un expo au cinéma d’art et essais à Blois, les Lobis, entre Avril et Mai. Une expo dans une médiatek à Guéret, dans le Limousin, à l’occasion du festival Metal Culture(s) entre Mai et Juin. A part de nombreuses illustrations à faire en ce moment (affiches de concert, dessins pour des particuliers, logo de label, artworks de t-shirt et pochettes de vynil pour des groupes et un peu d’illustration alimentaire), j’ai déjà en tête mon projet pour 2020. Car l’année prochaine je vais « féter » mes 10 ans dans le poster rock et la sérigraphie de concert. J’ai commencé en Mai 2010 avec une sérigraphie pour le concert des Tindersticks à l’Astrolabe à Orléans. Du coup j’aimerai proposer un beau bouquin à mes fans, l’année prochaine. Et cette fois il sera en couleur (tous mes artbooks sont imprimés en n/b car les coûts sont moindres et surtout que mon dessin s’y prête bien). La pagination sera proche des 140 pages, je pense. Et le format sera plus grand aussi. Tu es le premier à qui j’en parle, tiens.
Un secret à partager?
Héhé, je viens de t’en divulguer un, c’est déjà pas mal, non ?
Merci Will (l’avantage du bloging, c’est que l’on connaît l’identité des personnes, mais je me tairai jusqu’au bout;)).
Vous pouvez retrouver Will sur son site, sur sa boutique en ligne et bien évidemment sur le site Ulule.
Paris by Night, pour Vampire la Mascarade